vin du futur sans eau sans chimie et avec des chauves souris

Le vin du futur ? Cultivé sans eau, sans chimie, et avec des chauves-souris !

Des cépages anciens, de l’agriculture de précision, des chauves-souris anti-pesticides et même des bouteilles plus légères… Le monde du vin est en pleine révolution face au climat. Et ce que vous allez lire risque de changer votre regard sur votre prochain verre.

Vieil homme face à des vignes ravagées par la sècheresse

Le vin face au chaos climatique : une transformation urgente

João Raposeira scrute ses rangées de vignes enchevêtrées dans la région de l’Alentejo, au Portugal. « La plupart trouvent ça bordélique ! » plaisante-t-il. « Mais la nature, c’est le bordel. C’est comme ça qu’elle fonctionne le mieux. »

Raposeira n’est pas un marginal. Il fait partie d’un mouvement croissant de vignerons qui conjuguent méthodes ancestrales et technologies de pointe pour affronter l’urgence climatique.

Et si la production de vin n’est pas le plus gros pollueur de la planète, elle dispose d’un pouvoir symbolique immense, selon Tobias Webb, fondateur de la Sustainable Wine Roundtable. « Le vin a une empreinte sociale incroyable. Il peut faire bouger les lignes. »

L’Alentejo, laboratoire d’un nouveau modèle viticole

C’est au cœur du Portugal que se joue l’un des paris les plus audacieux : transformer la viticulture sans perdre son âme.

L’Alentejo, région aride et exposée, abrite le plus grand programme de viticulture durable d’Europe. 639 exploitations y participent, représentant plus de 60 % des surfaces cultivées. Le programme est gratuit, volontaire, et pousse les producteurs à réinventer leurs pratiques.

vignes au milieu des arbres, pour apporter de l'ombre

À la cave Fitapreta, par exemple, aucun arrosage intensif, mais des cultures de couverture (herbes, fèves…) pour nourrir le sol. Les cépages locaux sont privilégiés, mieux adaptés à la sécheresse, et même les levures sont indigènes.

Biodiversité, agroforesterie et… chauves-souris

Dans ce modèle inspiré de la permaculture, les vignes cohabitent avec des chênes-lièges centenaires, des haies sauvages et des zones tampons naturelles. Ces choix ne sont pas esthétiques : ils limitent les incendies, régulent l’humidité et accueillent les auxiliaires naturels comme les chauves-souris, redoutables prédatrices d’insectes nuisibles.

vignes entourées d'arbres pour favoriser la cohabitation naturelle des plantes, un écosystème complet comme dans l'ancien temps

« Un seul chiroptère peut manger la moitié de son poids en nuisibles chaque nuit », explique Raposeira.

Autre arme secrète : la gestion gravitationnelle de l’eau via le concept de Keyline, qui capte les pluies en altitude pour les redistribuer naturellement.

Aux États-Unis aussi, le vin se réinvente

Loin du Portugal, l’Oregon expérimente aussi la résistance. À la cave Abacela, aucun insecticide, beaucoup de travail manuel, et des techniques de gestion du feuillage pour protéger les grappes du soleil.

vignes écologiques hautes pour faciliter la récolte

Le bâtiment est chauffé et refroidi par géothermie. Des toiles d’ombrage protègent les grappes. Et comme en Europe, certains explorent la biodynamie, une philosophie qui pousse l’écologie jusqu’à enterrer des cornes remplies de silice à la pleine lune.

De la vigne à la bouteille : chaque geste compte

Quand vient le moment de presser le raisin, Fitapreta va jusqu’à réutiliser les résidus du troisième pressurage pour créer un vin orange, baptisé « Laranja Mecânica » – clin d’œil à Kubrick. Rien ne se perd.

pressoir à raisin ancien en bois, pressant des raisins rouges pour faire du vin traditionnel avec les méthodes ancestrales

Côté énergie, des domaines comme Familia Torres en Espagne couvrent plus de 50 % de leurs besoins via le solaire, le bois ou des véhicules électriques. Même le CO₂ issu de la fermentation est capté et réutilisé.

Le poids de la bouteille : l’autre scandale du vin

Le transport du vin, surtout en bouteilles lourdes, est l’un des plus gros postes d’émission. La Sustainable Wine Roundtable vient d’ailleurs d’imposer une limite de 420 g par bouteille pour ses membres d’ici 2026.

Bouteille de vin éco-concue, écologique, sur une table en bois devant les vignes au soleil

Les industriels du verre s’adaptent, développant des bouteilles ultralégères capables de résister à l’export.

Travail des saisonniers : l’angle mort du vin “vert” ?

Mais l’écologie ne doit pas faire oublier les conditions sociales. En Italie, plusieurs domaines ont été épinglés pour emploi illégal de migrants. Le Roundtable pousse pour des standards clairs, y compris sur le droit du travail.

« Quand la certification est sérieuse, les conditions s’améliorent vraiment », insiste Webb.

Les consommateurs ne guident pas encore la révolution… mais ça pourrait changer

Malgré les efforts, ce ne sont pas les acheteurs qui poussent le changement, mais les producteurs eux-mêmes, forcés par la réalité climatique.

« Ce qui attire le consommateur aujourd’hui, ce sont les expériences. Comprendre le terroir, les pratiques, la nature derrière le vin », résume Greg Jones, vigneron.

Conclusion : un verre à la fois, ils redéfinissent notre avenir

La transition est en marche. Pas parfaite, pas uniforme, mais tangible. Derrière chaque verre, se joue désormais bien plus qu’une question de goût : un enjeu de survie agricole, sociale et écologique.

Et si le vin n’a jamais été aussi bon… c’est peut-être parce qu’il n’a jamais eu autant de sens.

Noémie Dumas

Noémie Dumas est une maman de 35 ans passionnée par l'écologie et la collapsologie. Noémie a mis en place son petit nid éco responsable et résilient avec sa famille. Dans cet environnement paisible, la famille a tissé des liens fort et a établi, petit à petit, une micro-société bienveillante et résiliente.